Éclairage sur la stratégie

Le point sur la stratégie Income : des rendements attrayants aujourd'hui, et une possible hausse des prix demain

De nombreux investisseurs conservent leurs liquidités, mais nous pensons qu'il est temps de se tourner vers les obligations.

Le marché obligataire offre actuellement un potentiel de rendement similaire à celui des actions moyennant un risque moindre grâce à des rendements sans équivalent dans l'histoire récente. Dans l'article qui suit, Dan Ivascyn, qui gère la stratégie Income de PIMCO conjointement avec Alfred Murata et Josh Anderson, explique avec Esteban Burbano, stratégiste obligataire, comment le portefeuille est positionné pour bénéficier non seulement de la hausse actuelle des rendements, mais aussi des perspectives de résilience accrue et de hausse des prix dans divers scénarios économiques futurs.

Q : À quoi la stratégie Income doit-elle sa solide performance en 2023 ?

Ivascyn : L'année a été difficile mais riche en rebondissements pour les obligations. Les rendements ont terminé l'année à peu près à leur point de départ, mais avec une énorme volatilité entre les deux. Cette volatilité nous a permis d'ajuster notre sensibilité (aux taux d'intérêt) de manière tactique, d'accroître notre exposition à des secteurs offrant des opportunités de valeur relative attrayantes à l'échelle mondiale et de diversifier nos sources de rendement. Les rebonds peuvent survenir rapidement. Pour les investisseurs réticents à abandonner les liquidités, je pense que 2023 a fourni un bon exemple de la façon dont la patience et la capacité à supporter une légère volatilité des marchés obligataires peuvent permettre d'exploiter encore mieux le potentiel d'une classe d'actifs offrant déjà un rendement attrayant.

Q : Les marchés des taux d'intérêt s'attendent à ce que de nombreuses banques centrales des pays développés commencent à abaisser leurs taux, ce qui laisse présager un ralentissement. Dans le même temps, les spreads de crédit restent serrés, ce qui peut traduire des perspectives macroéconomiques plus optimistes. Quelles sont les perspectives de PIMCO en ce qui concerne la politique de la Réserve fédérale et l'économie américaine ?

Ivascyn : Notre scénario de base table sur une poursuite du ralentissement de l'inflation, même si, du fait de la rigidité des salaires, il est possible que les objectifs des banques centrales ne soient pas atteints. Par suite des progrès sur le front de l'inflation, de nombreuses banques centrales des pays développés, y compris la Fed, vont probablement baisser leurs taux cette année afin de soutenir la croissance. Néanmoins, les marchés, aussi bien d'actions qu'obligataires, semblent trop optimistes quant à la rapidité avec laquelle les banques centrales abaisseront leurs taux.  

Selon nous, le marché entrevoit à juste titre la possibilité d'un atterrissage en douceur aux États-Unis. Cependant, les spreads de crédit et les valorisations des actions tiennent compte d'une très faible probabilité de risque de récession ou de reprise de l'inflation. La politique monétaire met du temps à se répercuter sur l'économie, or nous constatons une stagnation de la croissance de l'offre et de la demande sur les marchés développés, ce qui, à notre avis, laisse augurer d'un risque de récession plus élevé dans de nombreuses économies développées que ce que les marchés anticipent actuellement.

Q : Comment les rendements obligataires vont-ils selon vous évoluer par rapport aux actions ou aux liquidités ?

Ivascyn : Les prochaines années s'annoncent très prometteuses pour les stratégies obligataires axées sur le revenu gérées activement, à l'instar de la stratégie Income. Les marchés obligataires ont tendance à être plus prévisibles et moins volatils que les autres segments des marchés financiers, et les rendements de départ constituent historiquement un excellent indicateur des rendements sur les trois à cinq années suivantes. Dans ce contexte, nous pensons que les obligations peuvent générer des rendements similaires à ceux des actions moyennant un risque moindre.  Lorsque la Fed commencera à abaisser ses taux, les rendements pourraient, à la faveur d'une hausse des prix, grimper au-delà des niveaux élevés atteints l'an passé. Les rendements des liquidités ont sans doute atteint un sommet, et ils sont très fluctuants. Lorsque les taux d'intérêt baisseront, nous pourrions assister à un recul des rendements des liquidités et à une hausse simultanée de ceux des obligations.

Q : Comment vos perspectives économiques influent-elles sur le positionnement du portefeuille ?

Ivascyn : Les marchés obligataires sont à même de faire face à de multiples scénarios macroéconomiques. Les rendements restent proches de plus hauts de 15 ans. Comme les valorisations des segments plus risqués du marché sont en fait plus chères, nous n'avons pas à faire beaucoup de concessions en termes de rendement pour nous réorienter vers des secteurs de meilleure qualité, plus résilients et plus liquides.

Afin d'atténuer le risque d'un atterrissage brutal de l'économie, nous avons, au cours des derniers trimestres, considérablement réduit notre exposition au crédit d'entreprises de qualité inférieure et plus sensible à la conjoncture, qui comporte des clauses limitées au profit des investisseurs, pour nous tourner vers les marchés titrisés, liquides et de meilleure qualité. Une plus grande liquidité nous apporte la souplesse nécessaire pour cibler des opportunités très prometteuses à l'horizon de cette année et au-delà.

Nous sommes convaincus que notre positionnement dans des secteurs plus résilients du marché au niveau mondial différencie la stratégie Income des autres stratégies obligataires multisectorielles ou stratégiques.

Q : L'équipe Income est très active en matière de positionnement sur la sensibilité aux taux. Quels segments spécifiques de la courbe des taux et quels marchés au niveau mondial offrent les meilleures opportunités de valeur ?

Ivascyn : Nous avons légèrement réduit l'exposition aux taux d'intérêt de la stratégie par rapport au pic de l'année dernière. Elle se situe actuellement en dessous du point moyen de notre fourchette historique et se concentre sur le milieu de la courbe, c'est-à-dire les échéances de 5 à 10 ans. Nous détenons de petites positions sur la partie courte de la courbe – les échéances inférieures à cinq ans –, mais nous les avons récemment réduites, car les échéances très courtes semblent surévaluées en raison d'un optimisme excessif quant à la rapidité avec laquelle les banques centrales abaisseront leurs taux. Lorsque la Fed finira par baisser ses taux d'intérêt – et si, comme nous le prévoyons, l'inflation se maintient à des niveaux supérieurs à ceux auxquels nous étions habitués avant la pandémie –, les rendements des obligations à long terme pourraient selon nous encore augmenter, ce qui exercerait une pression sur les cours.

Une autre raison pour laquelle nous privilégions les échéances intermédiaires est que nous sommes préoccupés par la viabilité à long terme des déficits fédéraux dans certains pays, notamment aux États-Unis. Le lourd déficit américain, qui continue de s'accroître, pourrait entraîner une augmentation des émissions d'obligations du Trésor et une hausse des taux à mesure que les marchés absorberont ce risque. Nous commençons à diversifier notre exposition aux taux d'intérêt sur des marchés de grande qualité en dehors des États-Unis, notamment en Australie, en Europe et au Royaume-Uni.

Dans le même temps, nous conservons une position en obligations du Trésor américain indexées sur l'inflation afin de nous protéger contre le risque d'une accélération de l'inflation outre-Atlantique.

Q : En ce qui concerne les différents secteurs du marché, les MBS (titres adossés à des créances hypothécaires) d'agences représentent désormais une part importante du portefeuille. Quelles perspectives ce secteur offre-t-il ?

Ivascyn : Historiquement, les titres hypothécaires d'agences ont pris de la hauteur dans un contexte de faible volatilité des taux d'intérêt. Actuellement, les MBS d'agences affichent des spreads élevés, qui reflètent la forte volatilité des marchés, mais aussi la baisse de la demande des banques et de la Fed, qui ont cessé d'acheter ces titres.  

Les valorisations des MBS d'agences nous paraissent attrayantes, aussi avons-nous progressivement renforcé nos importantes positions. Selon nous, il est probable que les banques centrales des pays développés n'assoupliront leur politique que progressivement, ce qui créera un environnement plus favorable, caractérisé par une moindre volatilité des taux d'intérêt. Il s'agit normalement d'un marché liquide sur lequel les titres bénéficient de garanties implicites ou explicites du gouvernement américain et se négocient sur la base de spreads très intéressants par rapport à ceux émis par les entreprises. Cependant, c'est un marché très complexe, et la sélection des titres joue un rôle important. Nous bénéficions d'une équipe expérimentée de spécialistes hypothécaires, qui négocient activement des MBS d'agences afin d'optimiser la performance.

Q : Quels autres secteurs du marché recèlent selon vous de la valeur ?

Ivascyn : Nous continuons d'accroître notre exposition aux titres adossés à des crédits hypothécaires non émis par des agences, en mettant toujours l'accent sur les prêts hypothécaires existants qui ont permis de constituer des capitaux propres importants, présentent de faibles ratios prêt/valeur et ne dépendent donc pas de la poursuite de la hausse des prix de l'immobilier ou de leur stabilité pour générer des rendements. PIMCO est l'un des principaux acteurs, si ce n'est le plus important, sur ces marchés, non seulement aux États-Unis, mais aussi au Royaume-Uni et dans des segments clés en Europe.

Parmi les autres secteurs du crédit adossé à des actifs de consommation, les prêts automobiles et étudiants de qualité offrent également des opportunités attrayantes. Nous conservons en outre un positionnement actif sur d'autres produits structurés de première qualité, des obligations adossées à des prêts (CLO) de rang senior et des titres adossés à des créances hypothécaires commerciales diversifiées. Non seulement ces secteurs recèlent des émetteurs de qualité et bénéficient d'une bonne diversification, mais ils sont aussi soutenus par des actifs tangibles qui apporteront un soutien supplémentaire en cas de récession économique.

En revanche, la prudence est de mise envers les emprunts bancaires senior garantis. Comme presque tous ces prêts sont assortis de taux d'intérêt variables, les emprunteurs, dont beaucoup sont de petites entreprises fortement endettées, doivent faire face à des coûts de service de la dette nettement plus élevés que prévu. À moins d'une baisse des taux à court terme, la situation sur ce segment du marché du crédit devrait selon nous continuer de se détériorer, tant en termes absolus que relatifs.

Q : Quel regard portez-vous sur le secteur financier ?

Ivascyn : La plupart des grandes banques américaines et mondiales d'importance systémique sont bien capitalisées. Au vu de la trajectoire incertaine de l'économie, nous avons néanmoins réduit notre exposition globale, en ramenant la part de la dette bancaire subordonnée à son plus bas niveau depuis de nombreuses années. Cependant, nous avons ajouté des obligations de grande qualité occupant un rang senior dans la structure du capital des grandes banques mondiales. Bien que certaines banques plus petites puissent encore être confrontées à des risques, nous n'anticipons pas de problèmes majeurs dans le secteur financier ; nous identifions simplement de meilleures opportunités de valeur dans d'autres secteurs susceptibles d'offrir encore plus de résilience.

Q : Comment la stratégie Income est-elle positionnée sur les marchés émergents du crédit compte tenu des risques géopolitiques ?

Ivascyn : Nous avons conservé une exposition limitée aux marchés émergents, préférant privilégier des secteurs plus défensifs tels que les prêts hypothécaires d'agences et autres produits structurés. La dette émergente reste toutefois une importante source de diversification. Nous mettons l'accent sur des segments résilients et de qualité du marché, notamment le Brésil et le Mexique, ainsi que sur des situations spéciales ciblées en Europe de l'Est et en Asie.

Nous détenons également un petit panier diversifié de positions sur des devises à haut rendement, notamment d'Amérique latine. qui ont notablement contribué à la performance l'an passé.

Q : Comment résumeriez-vous les perspectives des marchés obligataires ?

Ivascyn : Nous sommes enthousiasmés par les opportunités que présentent les marchés obligataires à l'horizon 2024 et au-delà. Les rendements et les valorisations semblent attrayants d'un point de vue historique, même en termes corrigés de l'inflation, par rapport aux actions cotées et à d'autres classes d'actifs présentant un risque plus élevé. Après de nombreuses années de rendements faibles, voire négatifs, nous pensons que les obligations de qualité ont retrouvé de la valeur aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Europe et en Australie. Le parcours n'a pas été de tout repos, et des difficultés pourraient encore survenir, mais cette volatilité représente peut-être la meilleure opportunité d'exposition tactique que nous ayons connue depuis des années. Nous continuons à tirer parti de notre plateforme mondiale et cherchons à générer de solides performances corrigées du risque, assorties de revenus stables, dans divers environnements économiques.

L’auteur

Daniel J. Ivascyn

Group Chief Investment Officer

Esteban Burbano

Spécialiste produits

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